[Instruction du Procès Klaus Barbie : confrontation avec...

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localisation Bibliothèque municipale de Lyon / P0759 FIGRPTP0272 07
technique 1 photographie positive : tirage noir et blanc ; 15 x 20 cm (épr.)
description Lise Lesèvre arrive à la prison Saint-Joseph accompagnée de ses avocats, Me Joë Nordmann et Ugo Iannucci.
historique Le procès de Nikolaus dit Klaus Barbie s'est déroulé du 11 mai au 4 juillet 1987 devant la Cour d'Assises du département du Rhône, au Palais de Justice de Lyon. C'était la première fois en France que l'on jugeait un homme accusé de crime contre l'humanité. Les charges retenues contre Barbie concernaient trois faits distincts : la rafle opérée à Lyon le 9 février 1943 à l'Union Générale des Israélites de France (UGIF), rue Sainte-Catherine ; la rafle d'Izieu du 6 avril 1944 ; la déportation de plus de 600 personnes dans le dernier convoi parti le 11 août 1944 de Lyon à destination des camps de la mort. Au terme de huit semaines d'audience, Klaus Barbie est condamné le 4 juillet 1987 à la réclusion criminelle à perpétuité. Il décède le 25 septembre 1991 à la Prison Saint-Joseph à Lyon.
historique Ancienne résistante, rescapée des camps de la mort, Mme Lise Lesèvre s'est retrouvée plongée le 27 janvier 1987 dans la période la plus noire de sa vie. Une période dont elle a lu le reflet tragique dans les yeux d'un homme vieilli : Klaus Barbie. Ce regard auquel elle a accroché le sien, dans ce parloir de la prison Saint-Joseph, ce regard fut au mois de mars 1944 celui d'un vainqueur dont elle était la proie. Sa première rencontre avec le chef de la Gestapo de Lyon marqua le départ d'interminables moments de peur, d'angoisse et de souffrances, tant physiques que morales qui allaient la conduire bien au delà des limites de l'insoutenable. Dix-sept fois, elle fut mise en présence de Barbie. Dix-sept fois, il tenta, en vain, de lui arracher des aveux et des renseignements sur la résistance, accompagnant ses questions de coups de nerf de boeuf, de sévices d'une cruauté inouïe. Les menaces, les tortures, l'arrestation même de son mari Georges Lesèvre, et de leur fils Jean-Pierre, 16 ans, qui périront en déportation ; toutes ces souffrances si elles brisèrent son coeur et son corps ne purent faire vaciller, ne serait-ce qu'un instant, la volonté de cette femme, membre d'un réseau dont le nom "Combat" symbolisait si bien l'engagement et la vie. Aujourd'hui, Lise Lesèvre est une vieille dame de 86 ans, au joli visage adouci par ses cheveux blancs. Habitée par une détermination que les ans n'ont pas entamée. "Dans la rue, je n'aurais pas reconnu Barbie, mais là, dans sa prison, je l'ai retrouvé", a-t-elle confié à sa sortie de Saint-Joseph, au terme de trois heures de confrontation avec celui qui fut son tortionnaire. Une Confrontation entrant dans le cadre du supplément d'information diligenté par la chambre d'accusation de Paris et, plus précisément, par son président M. Jean Pascal. Cette instruction supplétive fait suite à l'entrée dans le champ des poursuites contre Barbie d'un certain nombre de crimes perpétrés par ce dernier et dont furent victimes des résistants, ou non, à l'image des membres de la famille Lesèvre. Assisté de ses avocats - Maîtres Iannucci, Nordmann et Roland Dumas (arrivé in-extremis... juste assez tôt pour pouvoir sortir sous les flashes avec la vieille darne à son bras) l'ancienne déportée de Ravensbrück a trouvé en face d'elle un adversaire, très décontracté, sinon narquois. L'arrestation de Mme Lesèvre, les séances de tortures qu'elle a subies ? Sa responsabilité n'est en aucune façon engagée. A cette époque, aux combats des Glières avaient succédé ceux du Jura et lui, Barbie, se battait du côté de Saint-Claude. La déportation ? Elle a été précédée d'une condamnation à mort prononcée par un tribunal militaire allemand - condamnation commuée en détention -, le sort de Mme Lesèvre dépendait non plus de la Gestapo, mais de la Wehrmacht. Se défendant tous azimuts, l'ex-chef de la IXe section du SIPO-SD de Lyon a tenté de gommer le caractère particulièrement odieux du chantage affectif dont il se rendit coupable pour faire avouer sa prisonnière, pour lui faire dire où se trouvait "Didier", le chef de l'Armée secrète, pour la région de l'Ain. Lors de son arrestation, le 13 mars, à la gare de Perrache, elle portait sur elle un pli, banal dans son contenu, mais destiné à ce dernier. D'où l'acharnement de Barbie pour obtenir des renseignements de la jeune femme : les tortures et les pressions exercées sur elle pour la faire céder. "Grâce aux déclarations du mari, les Allemands ont pu découvrir dans le jardin de la maison des Lesèvre des documents. Ce qui prouve bien que le mari était informé des choses de la Résistance" a souligné l'avocat de Barbie, maître Jacques Vergès, précisant au passage qu'il avait demandé et obtenu que soit intégralement versé au dossier un carnet, un journal tenu par Mme Lesèvre à cette époque et qui, jusqu'à présent, ne figurait dans la procédure que sous la forme d'extraits photocopiés. Barbie et son défenseur jouent sur tous les tableaux, en profitant de la difficulté de reconstituer quarante ans après les événements et l'itinéraire suivi par chacun des protagonistes dans un monde en convulsions... Maitre Vergès émaillant son propos de formules à l'emporte-pièce sur le flou des déclarations des parties civiles. N'épargnant pas plus ses chers "confrères" du barreau. Pendant ce temps-là, et tandis que sifflent les balles, la Justice poursuit son petit bonhomme de chemin. Au début du mois, sera opéré un récapitulatif des différents actes d'information concernant le dossier Lesèvre. Il restera à la Chambre d'accusation à se réunir et à rendre son arrêt, renvoyant Barbie devant les Assises du Rhône. Source : "Image retrouvée d'un passé e violence et d'horreur" / Gérard Schmitt in Lyon Figaro, 28 janvier 1987, p.5.
note bibliographique "Affaire Barbie : le dernier regard" / Eliane Bègue in Lyon Matin, 28 janvier 1987. - "La résistante confrontée au bourreau" / Odile Cimetière in Le Progrès de Lyon, 28 janvier 1987. - "Lise Lesèvre face à son meilleur ennemi" / Mireille Débard et Bernard Fromentin in Lyon Libération, 28 janvier 1987. - Face à Barbie : Souvenirs-cauchemars de Montluc à Ravensbrück / Lise Lesèvre, 1987 [BM Lyon, K 11495].

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